Sowat – Ars longa, vita brevis

Pour sa première exposition solo, l’artiste français Sowat a réalisé une trentaine de toiles à la bombe aérosol et à l’encre qu’il présente du 23 avril au 6 juin dans l’espace de la Richard & Le Feuvre Gallery à l’hôtel Richemond de Genève. Trente toiles dans lesquelles on retrouve l’amour de l’écriture et du geste que Sowat décline dans la ville et ses lieux périphériques depuis de nombreuses années. Décryptage…

 

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Si l’on s’est habitué à voir le travail de Sowat intégré aux productions collectives du collectif Da Mental Vaporz ou en compagnie de Lek, c’est aujourd’hui son travail personnel qui est dévoilé dans la nouvelle galerie genevoise. « Ars longa, vita brevis » : l’art est long, la vie est brêve. Derrière cette citation d’Hippocrate suggérée par son ami Jean-Charles de Castelbajac, Sowat souligne la contradiction entre l’éphémère travail de rue et la longévité des œuvres réalisées sur toile. Car c’est au graffiti et plus précisément au tag que Sowat rend hommage dans son exposition, déclinant sous plusieurs formes l’écriture de son nom et de son crew. Immergé pendant plusieurs mois dans son atelier parisien, il a réalisé deux séries de toiles, l’une à la bombe aérosol, l’autre au pinceau et à l’encre.

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« La première série est travaillée à la bombe de peinture. Je voulais donner l’impression que chaque toile représente un bout de mur que l’on aurait arraché à la ville…
Sur des fonds en aplats bleu, blanc, noir ou rouge, j’ai tracé mes écritures en tons sur tons avec des gestes rapides de manière à faire ressortir l’aspect typique de la peinture pulvérisée, soulignant ainsi l’adn du graffiti. »

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« L’idée était de prendre quelque chose qu’à priori les gens en dehors du mouvement n’aiment pas forcément, à savoir les tags, et de trouver des moyens pour les sublimer, les faire devenir autre chose. Pour cela, j’ai utilisé des couleurs fluorescentes qui, plutôt que de souligner une esthétique, évoquent pour moi un sentiment, une ambiance… J’avais en tête certains films de Kurosawa dans lesquels on voit des champs de bataille couverts de grands étendards en couleurs primaires avec quelques signes minimalistes imprimés dessus. Je pensais également au travail de Georges Mathieu, Christopher Wool et bien sûr Chaz Bojorquez qui est ma référence principale en termes d’écriture liée au graffiti. »

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Après la bombe aérosol, c’est aux tags réalisés au marqueur auxquels Sowat fait référence en réalisant sa deuxième série à l’encre. Des encres bleues, vertes ou rouges comme la célèbre marque de teinture pour cuir Corio-Meleine, plébiscitée par les tagueurs parisiens du début des années 90.

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Au delà de l’écriture et du geste, Sowat présente dans cette série un travail de chimie qu’il provoque en mélangeant différentes substances. Encore un hommage aux origines du writing dont les adeptes ont toujours cherché à rendre leurs tags ineffaçables, jouant aux apprentis chimistes en ajoutant à leurs encres du bleu de méthylène avant de faire bouillir le tout.

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« Cette série à l’encre, je l’ai réalisée horizontalement, contrairement à la première série où les toiles étaient accrochées aux murs. À plat, la toile me parait plus grande. C’est plus physique, plus compliqué à travailler, je suis constamment en équilibre au dessus des formats. J’applique une encre très liquide au pinceau. Cela donne des sortes de flaques auxquelles j’ajoute des produits or et chrome. »

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« Ce sont les mélanges qui se produisent lors des temps de séchage – qui peuvent durer une à deux semaines – qui m’intéressent ici. Il en résulte une écriture barbare rendue illisible par l’alchimie.
En réalisant cette série, j’avais autant en tête les milliers de tags réalisés au marqueur et aujourd’hui disparus que le travail d’artistes contemporains comme Cy Twombly ou Jackson Pollock. C’est ce pont entre ces différents univers que j’essaye de viser en présentant en galerie un travail issu de la rue. »

Rendez-vous donc à Genève pour découvrir cette exposition à mi-chemin entre écriture, calligraphie, peinture et abstraction.

Texte et photographies : Nicolas Gzeley

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